Il a fallu quelques secondes à Inès pour se rappeler où elle était exactement. Au début, elle pensait être dans sa chambre à Full Horse, mais après avoir papillonné des paupières plusieurs fois et reconnu tous les posters de son adolescence, elle remit le lieu où elle se trouvait actuellement. Elle s’était endormie la veille au soir en seulement quelques secondes. Son voyage en avion combiné aux émotions de se retrouver chez elle l’avaient épuisé.

Elle ne descendit pas prendre son petit déjeuner directement, Inès était avant tout attirée par tous les souvenirs que renfermaient sa chambre. Elle s’installa à son bureau, ouvrant chaque tiroir l’un après l’autre. Elle retrouva ses cahiers de cours, avec des petits mots griffonnés dans les marges par ses copains d’écoles. Puis les photos de classe, de sa petite section à sa terminale, s’extasiant sur le changement physique de certaines personnes qui l’avaient suivis pendant pas mal d’année. Ce fut plus dur quand elle retomba sur un album photo, remplit par différents clichés de son père et elle.

C’est les larmes qu’elle feuilleta cet album, souriant en se remémorant certaines choses.


Quand elle avait sept ans, son père lui acheta un beau vélo, violet et blanc, avec des pompons aux poignets. Inès avait énormément peur de monter sur ce vélo parce qu’elle le trouvait bien trop grand, et surtout son petit vélo jaune canari lui manquait beaucoup trop. L’enfant s’était mise à pleurer, secouant la tête à chaque fois que son père lui demandait d’essayer au moins un peu ce nouveau vélo flambant neuf qu’il avait choisi exprès pour lui faire plaisir. Ce n’était pas qu’elle n’aimait pas ce nouveau vélo, mais elle se sentait très mal à l’idée de se séparer de l’ancien qui était pourtant très bien à son goût. Elle pouvait poser ses deux pieds bien à plat de chaque côté, il avait un auto collant my little ponies sur le guidon et surtout, elle le connaissait depuis longtemps puisque c’était lui son premier vélo sans petite roue. La blonde ne voulait pas s’en séparer et rien que l’idée la rendait excessivement triste.

« Tu verras, avec ce nouveau vélo, tu iras tellement vite que même moi je ne pourrai te rattraper. 
— Ah bon ?
— Promis. »

Elle sourit, dévoilant une dent manquante bien au milieu. Personne ne pouvait le manquer. Inès avait perdu cette dent une semaine auparavant en croquant dans une pomme.

La jeune fille s’approcha alors de ce vélo violet et décida alors de lui laisser une chance. Après tout, son père ne lui avait jamais menti et ne l’avait jamais déçu, qu’est-ce qu’elle risquait à essayer celui-ci ? Son paternel l’aida à grimper correctement sur le vélo, qui était légèrement trop grand et appuya sur les pédales. Elle fit plusieurs mètres, se rendant compte que finalement, elle aimait bien ce nouveau vélo avec les pompons violet sur le guidon.


« Papa ! Regardes, j’ai gagné à la course à l’école et on m’a offert ça. »

Inès courait en direction des bras de son père, portant un sweat à l’effigie de son école. Elle venait de participer à un tournoi inter collège, et elle était arrivée la première de tout les sixièmes, même battant les garçons. La petite fille était tellement fière que la première chose qu’elle fit en rentrant à la maison, c’est se ruer sur son père. Il l’attrapa dans ses bras, la serra contre lui et déposa un baiser sur son front.

« Je suis si fier de toi !
— J’ai accéléré au dernier moment, comme tu m’as appris et j’ai doublé Nolan, ce garçon la qui se croit être le meilleur en tout. Il a piqué une crise, il arrêtait pas de me dire que j’avais triché, pare qu’une fille ne pouvait pas battre un garçon.
— J’espère que tu lui as mis ton poings dans son nez ?
— Non, mais je l’ai nargué après avec ma médaille. Il était rouge de colère ! »

Nolan était un garçon de son collège, mais pas dans sa classe. A chaque fois, durant les récréations, il passait son temps à aller embêter toutes les filles, leur mettant des coups et en riant parce qu’elles n’arrivaient pas à lui rendre ensuite. Il se pensait tellement supérieur que Inès était ravie de l’avoir battu ce jour-là. Ça lui remettait les idées en place au moins.

« Tape m’en cinq ma fille ! C’est toi la plus forte ! »


Il faisait déjà nuit maintenant quand elle sortait du collège pour rentrer à la maison. Il était dix-sept heures trente, et son copain la raccompagnait jusqu’à son arrêt de bus, lui tenant la main. Inès n’y croyait pas, elle avait son premier copain, et en plus, c’était ce garçon qui n’arrêtait pas de l’embêter en sixième, Nolan. Une semaine avant, il lui avait envoyé un petit mot où il demandait si elle voulait être sa copine. Elle n’avait pas répondu sur le moment, puisque de toute façon, le professeur d’histoire aurait vite remarqué l’échange, il avait un véritable oeil de lynx pour ce genre de chose, mais aussi parce qu’elle ne savait pas si elle devait dire oui. Elle en avait parlé à la récré avec ses copines qui lui ont dit de dire oui, que Nolan était le plus beau garçon des quatrièmes, et qu’elle avait beaucoup de chance. Cela faisait maintenant une semaine qu’ils sortaient ensemble et ils passaient leur récré dans les bras l’un de l’autre et tous les soirs, Nolan l’accompagnait à son arrêt de bus.

Son téléphone vibra dans la poche de sa doudoune et elle répondit à sa mère.

« Rentre le plus vite possible chérie. J’ai laissé la clef sous le pot de fleur, je suis avec papa à l’hôpital. Si tu as faim, il reste une assiette de pâtes dans le frigo.
— Pourquoi vous êtes à l’hôpital ?
— Ton père a fait un malaise au travail et ils sont en train de lui faire des analyses. On rentre le plus vite possible. »

Le soucis, c’est que son père ne rentra pas cette nuit-là. Ni durant toute la semaine. Sa mère ne dormait plus la nuit, et Inès pleurait quand elle était seule dans sa chambre. La sentence était tombée, cancer généralisée. Cela avait été un véritable choc pour la petite famille Simon. Son père avait pourtant l’air de bien se porter ces derniers temps ? Il était certes fatigué, mais c’était à cause du travail. Enfin, c’est ce que l’adolescente croyait. Qu’est-ce qu’elle allait devenir le jour où son père allait la quitter ? Comment allait-elle s’en sortir ?


Inès était en train de faire ses devoirs dans la chambre d’hôpital de son père. Il était si pale, si maigre ! La maladie lui faisait perdre absolument tout ce qu’il avait. Puis ça avait été si rapide. De jour en jour, elle avait vu son père perdre ses couleurs, du poids, son énergie. Il était maintenant incapable de se lever tout seul pour aller aux toilettes et les médecins avaient décidés de lui brancher une sonde pour éviter qu’il appelle l’infirmière à chaque fois qu’il avait envie d’uriner. Il mangeait peu, ayant perdu l’appétit, et ses yeux étaient ternes. A cet instant, il dormait. Inès ne pouvait s’empêcher de pleurer dès qu’elle le voyait.

Quand elle eut fini ses exercices de mathématiques, elle s’installa à côté de son papa, dans la place qu’il laissait de libre exprès pour sa fille. Elle se lova contre lui. Elle ne pouvait pas le perdre. Son père était un homme bien trop fort pour perdre face à un cancer. Puis il était son héros, un héros ne meurt jamais non ?

Mais plus les jours passaient, plus son état se dégradait. Au fond d’elle, Inès savait ce qui allait se passer, elle savait qu’elle devait lui faire ses adieux avant qu’il ne soit trop tard, mais à chaque fois, elle sanglotait si fort que ça lui été totalement impossible.

« T’inquiète pas Inès. Dans quelques semaines, tu verras on sera à la maison en train de manger de la glace au chocolat en regardant le prochain marvel. »

Mais la vérité était toute autre. Son père s'affaiblissait, et dans ces derniers jours, il n'arrivait presque plus à parler. Deux mois après, son père rendit son dernier souffle. Inès n'avait que treize ans, et voir son père partir était pour elle quelque chose d'insurmontable. Elle commença sa descente aux enfers.

168 lignes J'aimerai avoir les PHS en PE. Merci au correcteur !