Inès préparait Diego pour l'emmener chez le Maréchal-Ferrant. Elle l'avait trouvé agité dans son box, comme tous les jours depuis son arrivé. Il allait finir par s'habituer, mais combien de temps cela allait prendre ? Alors elle le pansait avec soin, pour le détendre un maximum. Une fois prêt, elle l'emmena vers le centre de soin. L'étalon semblait reconnaître un peu les alentours, il avait l'air moins curieux que la veille.

Arrivée au rendez-vous, à l'heure cette fois-ci, elle fut accueillit par le brun qu'elle avait vu la vieille dans l'écurie avec la jeune femme à l'apparence de mannequin. Il faisait bien plus d'une tête que la fausse blonde et semblait aussi froid que la femme hier. De plus près, ils ont clairement un air de famille.

« Bonjour, mademoiselle Simon c'est ça ? »

Son regard sombre l'intimidait, elle se sentait sondée et bien faible face à lui. Elle jouait avec la longe de Diego, n'osant vraiment regarder l'homme droit dans les yeux.

« J'imagine que c'est Diego. Je suis Greg, l'apprenti de Monsieur McLean, je vais donc faire la visite avec lui. Attachez votre cheval ici, le maréchal va arriver d'une minute à l'autre. »

Inès fit ce qu'il lui demanda, attacha la longe de Diego à l'anneau de sécurité. Et pour la première fois depuis son arrivé à l'écurie nomade, l'étalon semblait au repos. Les yeux à moitié fermé et les oreilles en avant, il ne bougeait pour regarder les alentours. Peut-être qu'il s'habituait enfin aux locaux ? C'était en tout cas une bonne chose. Inès savait dans tout les cas que le maréchal-ferrant ne serait pas une épreuve puisqu'il a été habitué à être manipulé par tout les professionnels équins depuis poulain. Pour cela, elle avait une totale confiance en son cheval.

Greg faisait quelques aller-retours pour finir d'emmener tout le matériel dont avait besoin son formateur. Il installait tout correctement et quelques minutes après il vit arriver la chienne d'Anton. C'est comme ça qu'il remarqua que le maréchal était arrivé, en train de parler avec un homme, sûrement un autre maréchal au bout de l'allée. Il lui fit comprendre d'un signe de main qu'il allait arriver et Greg savait ce qu'il attendait de lui, à ce qu'il commence le travail.

Le canadien saisit alors un des membres de l'équidé, s'appuya sur lui pour qu'il déporte son poids sur la droite et ainsi commencer la vérification. Il faisait juste un premier bilan, devait ensuite tout retranscrire à son mentor, et annoncer ce qu'il faudrait faire ensuite.

Pendant ce temps-là, Inès elle regardait le jeune homme en train de travailler, toujours une main sur la tête de Diego qui ne semblait pas plus perturbé que d'habitude. Greg lui semblait concentré, mais il avait un visage grave et aussi marqué par une forme de tristesse ou de solitude. Le brun avait une manière de se tenir ou il semblait tendu, toujours un peu sur ses gardes. Elle n'osait pas l'interrompre alors qu'il faisait le tour des sabots de Diego, de peur de rencontrer son regard glacial. Elle était un peu tout son inverse. Inès était tellement avenante et sociable que de se retrouver face à un mur de glace était très perturbant pour elle. Alors elle se retenait juste de parler. Parce qu'elle savait que cet homme pouvait très bien dire quelque chose que la fausse blonde prendrait mal, sans forcément que ce soit volontaire et elle en ferait tout un drame. Parce qu'elle est ainsi, avec elle c'est soit tout soit rien. Et à cet instant, il vaut mieux que ce soit rien.

Un autre homme, plus âgé, les cheveux blancs et une barbe bien taillée s'approcha d'eux. Lui semblait bien plus aimable. Il salua la jeune femme, et posa une main sur l'épaule de Greg.

« Alors, qu'est-ce que tu as pu remarqué ? ­­»

Inès n'a pas eu le temps d'entendre la réponse du jeune homme que son téléphone sonna. Elle attrapa son cellulaire dans sa poche et remarqua que c'était sa mère. Etrange, sa mère n'appelait jamais en pleine journée sans aucune raison. Elle s'excusa en balbutiant auprès des deux professionnels et s'écarta pour répondre. Diego survivrait bien cinq minutes sans elle et il semblait si paisible qu'elle ne s'inquiétait pas trop. Puis bon, en tant que maréchal, ils avaient dû en voir des bien pires qui ne se laissaient sûrement pas du tout manipulés.

« Allô ?
— Bonjour, Inès, comment vas-tu ? Etrange, sa mère semblait de très très bonne humeur de l'avoir au téléphone.
— Bien. Quoi de neuf ?
— Je voulais juste t'annoncer que Franck m'a demandé en mariage et que j'ai dit oui ! Après tant d'année, je ne m'y attendais plus. »

Inès savait qu'elle aurait dû être heureuse pour sa mère. Pourtant quelque chose la chiffonnait. La fausse blonde avait souvent l'impression qu'elle était la seule des deux à pleurer encore son père, que sa mère l'avait juste effacé de sa mémoire en un claquement de doigts. C'était génial qu'elle se remarie après le décès de son premier époux, mais est-ce qu'elle s'était laissée le temps de faire son deuil ? Inès ne l'avait vu que très rarement pleuré pour son père, le jour de sa mort, le jour de son enterrement et le jour ou elles avaient rangés toutes ses affaires dans trois cartons. Toute la vie d'un homme tenait dans trois cartons.

Alors que la française elle avait pleuré des heures, des jours, des semaines et des mois. Et même encore, après plus de dix ans, il lui arrivait encore de pleurer quand elle repensait à lui. Moins souvent, mais c'était toujours douloureux. Alors que ça semblait si facile pour sa mère.

« Oh mais c'est génial ! Dit-elle en essayant de garder une voix enjouée.
— On se marie dans six mois, et j'aimerai que tu sois mon témoin.
— Avec plaisir. »

Oui, c'était avec plaisir, mais que devenait l'ombre de son père dans tout ça ? Qu'est-ce qu'il allait rester de lui maintenant que sa mère n'allait même plus garder son nom de famille ? Rien que dalle.

Elle mit fin à l'échange téléphonique, pris de grande bouffée d'air frais pour essayer de ne pas pleurer. Sa mère était en droit de refaire totalement sa vie, ça oui. Mais elle n'avait pas le droit de l'oublier. Une fois qu'elle se sentait plus apaisée, elle retourna auprès de Diego.

« Rien à signaler concernant les pieds de votre cheval, nous avons donc terminé. Si jamais vous avez besoin de quelque chose, n'hésitez pas, nous sommes toujours dans le coin. Au revoir mademoiselle. »

Le jeune homme lui ne lui dit rien, et ne lui jeta même pas un regard. Il se contentait juste de ranger tout le matériel pendant que la française détachait la longe de Diego. Elle lança un timide au revoir auquel il répondit par un grognement. Décidément, elle préférait être trop sociable que comme lui. Il devait être bien seul dans sa vie.

142 lignes; diego; utilisation d'un résumé x2 dans les PB de Noora

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