Noora avait quitté son pays pour un temps. L’académie mettait les voiles pour la Nouvelle-Calédonie et cela réjouissait l’ancienne mannequin. Finit l’hiver et la neige, ils allaient pouvoir sortir les chevaux en paddock, dans les prés puis enfin faire des séances en extérieur. Ils allaient être moins nombreux à vouloir travailler au même endroit. La plupart des chevaux seront donc plus calme, même si Noora avait pu remarquer que ça ne rendait pas Hermès vraiment chiant. Il était juste plus nerveux.

Noora attendait de pouvoir récupérer ses valises, entre ses vêtements, ceux d’équitation et son matériel, elle avait quatre bagages. Elle avait dû payer un surplus, mais tant pis, elle refusait de se séparer de certaines de ses affaires.

Greg et elle ne se parlaient toujours pas. Noora ne digérait pas tous ce qu’il lui avait dit, elle jugeait que tout était de la faute de l’aîné. Et les deux ne voulaient changer d’avis. Et les fautifs se repassent la faute. Un taxi l'attendait pour l'emmener à l'Académie. Une partie d'elle aurait aimé faire le voyage avec son frère, une infime partie. Mais il avait préféré prendre le vol avec les palefreniers et les chevaux de l'académie et propriétaire. Donc Hermès était déjà arrivé à Nouméa. Normalement, il doit passer faire une visite de routine par un vétérinaire, juste pour voir si ses vaccins sont à jour et si il ne s'est pas blessé pendant le voyage.

Quand le taxi la dépose, et que le chauffeur sort gentiment ses valises, Noora l'a bien vu grimacer en soulevant celle de ses vêtements, elle est époustouflée par le lieu où l'académie avait choisi de s'implanter. Du parking, elle voyait à sa gauche une étendue d'herbe puis au loin la plage et la mer. Elle voyait des petits cabanons sur pilotis. Si ceux sont leurs chambres, alors ils sont chanceux. Sur sa droite, de grands prés, mais aussi des écuries ouvertes. L'équipe du haras a bien choisi, clairement, ça envoie du lourd.

Elle remercie le chauffeur et monte sur une petite voiturette de golf mise à disposition pour que les élèves puissent se déplacer. Difficilement, mais sûrement, elle pose ses bagages sur la banquette arrière et se dirige vers le premier bâtiment qu'elle voit, le manoir. Elle reconnait plusieurs têtes d'élèves qui avancent eux vers les cabanons. C'était le pied. Elle les suivit pour aller rejoindre sa petite chambre et s'installer pour quatre mois.


Elle ne s'était pas rendue compte qu'elle s'était endormie. Le voyage en avion avait dû la fatiguer bien plus qu'elle ne l'avait cru. Elle regarda son téléphone, il était presque dix-huit heures, elle voulait passer voir Hermès, voir si il était bien installé. Elle enfila une culotte d'équitation fine, parce qu'elle se voyait mal se promener dans les écuries avec un pantalon fluide. Au fond, Greg l'avait bien plus touché qu'elle ne voulait le laisser paraître.

Enfilant des petites baskets, elle sortit du cabanon. Ah, il fait encore beau et chaud. Son polo lui suffisait amplement. Elle rabattit ses lunettes de soleil sur son nez et avança, regardant partout autour d'elle pour voir le plus de chose possible. Noora arriva enfin dans l'écurie des propriétaires et elle rentra recherchant son hongre à la robe sombre. Il n'était pas dans la première partie de l'écurie en L, mais presque au milieu de la seconde partie.

« Bah alors, mon grand, on préfère la chaleur à la tempête ? » Ce n'était pas bien sûr, Hermès était tout comme Noora du Canada. Peut-être qu'il était habitué aux grands froids. Quoi que, il faisait environ vingt-cinq degrés, et en été, au Canada, il fait environ vingt-cinq degrés aussi. « Tu veux aller passer ta soirée au pré avec les autres ? »

L'ancienne mannequin attrapa la longe qui était accroché sur un portant du box et l'ouvrit, avant d'attraper l'équidé par son licol en cuir. Elle l'emmenait alors en direction des pâtures disponibles. Hermès, comme à son habitude, traînait la patte. Noora était toujours surprise de voir la différence entre les moments où elle l'a en main et sous la selle. Comme si il y avait en vérité deux Hermès. Elle finit par le lâcher et il s'en va mollement vers une motte d'herbe pour aller brouter. Elle ira le récupérer ce soir, pour le moment, elle va aller profiter un peu de la plage.


Le lendemain, Noora se réveilla de bonne humeur. Elle était prête pour débuter des séances en extérieur avec Hermès, voir enfin ce qu'il donne sur un cross. Rapidement, elle prit une douche, puis s'habilla finement. Le soleil tapait déjà sur l'académie, et c'était un plaisir de ne pas sentir le vent glacial du canada sur son visage.

Mais son moral retombe d'un coup quand elle arrive devant le box d'Hermès et qu'elle le retrouve allongé, à se regarder le flanc.

« Oh merde ! »

Elle reconnaissait très bien ce qu'avait son cheval. Une colique. Tout en essayant de garder son sang froid, elle se rend rapidement vers la sellerie où sont affichés tous les numéros d'urgences. Elle composa rapidement celui du vétérinaire du haras et lui expliqua comment elle venait de trouver Hermès et où elle se trouvait dans l'écurie propriétaire.

Elle avait déjà vu des cas de colique sur les chevaux qu'elle avait quand elle était à la ferme et se souvient très bien de ce que faisait son père en attendant le véto. Elle revint au box de son équidé et lui accrocha la longe à son licol et essaya de le forcer à se lever. Hermès ne bougeait pas alors elle tira un peu plus fort, une main sur un passant du licol pour exercer plus de force.

« Allez mon grand, il faut que tu te lèves. »

Elle batailla encore quelques minutes et l'hongre finit par se redresser difficilement. Elle le sortit de son box et l'emmena jusqu'à l'extérieur de l'écurie pour l'obliger à marcher un peu. Le vétérinaire arriva enfin, avec son matériel.

« Vous avez eu un bon réflexe de le faire marcher. Tenez le moi, je vais l'osculter. »

Noora se chargeait alors de rassurer le noir. Elle lui grattait le chanfrein et lui parlait d'une voix douce tout en regardant du coin de l'oeil les réactions du vétérinaire. Il n'avait pas l'air inquiet, ce qui rassura grandement la jeune cavalière. Il réalisa le sondage naso-gastrique et Hermès ne broncha pas, peut être trop fatigué pour réagir.

« C'est une impaction au niveau du colon. Rien de bien grave, vous l'avez vu à temps. Je vais lui prescrire des laxatifs et des antalgiques. Pendant quelques jours, il faudra le mettre à la diète, le temps qu'il soit bien rétabli. Il faudra le faire marcher longtemps, éviter qu'il mange, nous avons des paniers si il le faut. Il faudra lui laisser l'eau à volonté par contre. Et puis vous reprendrez doucement le travail sans le brusquer. C'est un bon cheval, il tiendra le coup. Et il a une propriétaire avec de bons réflexes.
— Merci beaucoup monsieur.
— C'est normal. Si il y a le moindre soucis, n'hésitez pas à me rappeler ou venir au centre de soin. »

Et sur ceux, il parti, laissant la brune et le cheval à la robe sombre ensemble. Elle décida de le faire marcher encore un peu, tout en composant le numéro de son frère. Il ne répondit qu'au bout de la quatrième sonnerie.

« Qu'est-ce que tu veux ?
— Salut à toi aussi Greg. Hermès a une colique et le véto m'a fait une ordonnance. Je voulais savoir si tu pouvais aller me chercher les médocs pendant que je fais un peu marcher Hermès.
— T'es où ?
— Devant les écuries propriétaires. »

Et il raccrocha. Quelques minutes après, il était là, devant Noora, le visage fermé comme tout le temps depuis qu'il est arrivé à Full Horse, saisit l'ordonnance et s'en alla. Noora souffla, leur relation n'était pas prête de s'arranger. Elle faisait marcher presque un quart d'heure l'hongre qui, déjà que de base en main est assez mou, avait plutôt l'air amorphe puis le rentra dans son box en prenant soin de dégager toute source nourriture de son box. Greg revint avec un panier pour éviter que l'équidé mange et lui accrocha à son licol.

« Je m'occuperai personnellement de Hermès, je viendrais le voir pendant nos rondes et je le signalerai aux autres palefrenier. Hermès n'est pas le seul à avoir eu une colique, visiblement, le changement de temps entre le Canada et la Nouvelle Calédonie n'a pas trop plu à pas mal de chevaux. Bon, j'ai encore du travail moi. »

Noora hocha la tête mais ne répondit pas. SI Greg était aussi gentil, c'était pour Hermès. Même si il n'avait plus envie de remonter à cheval, il aimait quand même ces grandes bêtes. L'ancienne mannequin resta encore un temps à regarder Hermès avant de retourner dans sa chambre bouquiner. Elle allait devoir faire une pause dans ses entraînements avec Hermès.